
En ce mois de juillet, l’équipage d’ATKA ne sirote pas des limonades dans un transat au soleil. La côte ouest du Groenland est libre des glaces et ATKA navigue sur la côte pour collecter des données scientifiques. C’est le second été qu’ATKA réalise des missions scientifiques et le programme est chargé. Cet article est consacré à la science sur ATKA. Elle vous permettra d’en savoir un peu plus sur l’intérêt de récolter des données dans les eaux froides de l’Arctique.
L’ACTUALITÉ SCIENTIFIQUE D’ATKA
À bord, l’activité scientifique a pris le relais de l’artistique. L’équipage constitué à présent de trois marins, d’un coordinateur scientifique (Stephane AEBISCHER) et d’un chercheur, a fait route au nord, vers Uummannaq et Upernavik, pour collecter des sédiments, des copépodes et du microplastique. À cela se sont ajoutés la plongée pour collecter des moules qui seront analysées dans un laboratoire norvégien, et un filet à plancton traîné par 90 m de fond.
Pour plus d’information sur la mission du coordinateur scientifique, voici un article intitulé : Rencontre avec le coordinateur scientifique d’ATKA (été 2018).

L’équipe scientifique au complet avec de g. à d. : Léo, marin ; Stessy, étudiant du lycée maritime de La Rochelle ; Brieuc, capitaine ; Jérémie, scientifique ; Baptiste, second et Stéphane, le responsable scientifique.
Les 5 programmes
– Microplastiques : identification et compréhension des mécanismes de transfert du plastique dans les écosystèmes marins.
– Microplastiques : Étude de la moule commune comme indicateur de l’état de pollution des environnements marins polaires par les microplastiques.
– Plancton : étude de l’hybridation (croisement entre deux variétés d’une même espèce ou entre deux espèces) du plancton en Arctique (copépodes).
– Plancton : étude de la composition, distribution et l’abondance du zooplancton.
– Benthos : Caractérisation des communautés benthiques des côtes groenlandaises.

Collecte de moules communes – indicateur de l’état de pollution des environnements marins polaires par les microplastiques.

Le filet à plancton désigne un filet à très petites mailles, généralement fabriqué en soie à bluter, utilisé pour la capture de plancton afin de pouvoir, par la suite l’observer au microscope.
LES QUESTIONS-RÉPONSES
Voici une liste de questions associées aux différents programmes scientifiques d’ATKA. Ces question sont très souvent posées par les élèves lors des interventions dans les classes.
1/ » C’est quoi un copépode ? En quoi les cargos modifient les écosystème marins ? »
Les Copépodes constituent l’élément dominant du zooplancton.
Ils représentent parfois 80 % des individus planctoniques et jouent de ce fait un rôle fondamental dans le cycle biologique des mers et des océans. Dans les couches superficielles vivent des centaines d’espèces (environ 1500) dont la plupart ne dépassent pas 3-4 mm !

Dans le monde entier, les densités de population humaines ne cessent d’augmenter. Cela se traduit par une accélération continue et rapide de l’utilisation des océans et un accroissement des pressions sur les écosystèmes marins.
Avec l’accroissement du trafic maritime, les eaux de ballast* sont de loin la principale cause d’introduction des espèces invasives dans le milieu marin. Le plancton (copépodes compris) est alors coincé dans les eaux de ballast et transporté dans le monde entier par les cargos.
* Le ballast est un réservoir d’eau de mer de grande contenance équipant certains navires et destiné à être rempli ou vidangé d’eau de mer afin d’optimiser la navigation.
On estime que 7 000 espèces sont transportées dans le monde entier chaque jour dans l’eau de ballast et que 10 milliards de tonnes d’eau de ballast sont transportées chaque année de par le monde (cf carte ci dessous). Dans bien des cas, ces espèces nouvellement introduites s’adaptent mal à leur nouvel environnement et disparaissent rapidement. Il peut cependant arriver qu’elles survivent, se reproduisent et s’implantent. Une hybridation d’espèce opère alors. C’est peut-être le cas des copépodes en Arctique qui s’hybrident avec des copépodes d’autres océans.
L’impact de cette hybridation peut se traduire par une baisse de la diversité. Le problème des espèces introduites devrait s’aggraver au cours du prochain siècle à cause du changement climatique et de l’intensification du commerce et du tourisme. Il est nécessaire de continuer à étudier ce phénomène pour mieux le comprendre.
source : Rachid Amara, 2010 « Impact de l’anthropisation sur la biodiversité et le fonctionnement des écosystèmes marins. Exemple de la Manche-mer du nord ».

Pour visualiser la quantité et la position des navires partout dans le monde et comprendre l’impact de l’eau de ballast, une carte en temps réel existe. Attention, vous allez être surpris par la quantité !
2/ » C’est quoi le microplastique ? »
Notre sur-consommation de plastique est aujourd’hui considérée comme un véritable fléau environnemental envahissant la faune et la flore.
Selon l’Ifremer, 4 à 12 millions de tonnes de plastique se déversent chaque année dans l’océan. À cause de leurs propriétés particulières (flottaison, persistance), les plastiques peuvent être transportés sur de longues distances, et se retrouver jusque dans les endroits les plus isolés de la planète comme en Arctique.
Les micro-déchets plastiques (particules inférieures à 5mm, inférieur à un grain de riz), qui résultent de la fragmentation de ces éléments plus gros, ainsi que de la dispersion directe dans l’environnement de particules plus petites, représentent une menace encore mal connue et peu documentée. Leur taille, leur forme voire leur couleur font que de nombreux organismes marins confondent ces micro-particules avec leurs proies habituelles.

Les débris plastiques peuvent être classés selon leur taille : megaplastiques (> 1m), macroplastiques (2,5 cm à 1m), mésoplastiques (5 mm à 2,5 cm), microplastiques (0,1 μm à 5 mm = inférieur à la taille d’un grain de riz) et les nanoplastiques (< 0,1 μm).
Parfois invisibles à l’œil nu, les micro-plastiques sont très difficilement récupérables et contaminent ainsi l’ensemble de la chaîne alimentaire. Ces micro-plastiques sont aujourd’hui aussi nombreux en mer que les poissons y vivant. Cette statistique couvre des problématiques bien plus graves, autant pour la santé des océans et de leurs écosystèmes, que pour la santé humaine. En effet, la taille de ces plastiques les rend facilement ingérables par bon nombre de systèmes organiques, que cela soit par les poissons, les oiseaux, et même les coraux. L’ingestion de ces micro-plastiques provoque, à terme, l’obstruction des organes vitaux et conduit ces êtres vivants à des morts lentes et douloureuses.
Source : Lambert, 2015 : » Les microplastiques dans l’environnement marin : quels impacts pour les organismes ? » .
Pour en savoir plus, nous vous invitons à visionner une série d’épisodes sur Arte sur le microplastique : Le plastique, ennemi omniprésent de l’environnement.

3/ » Pourquoi ramasser des moules pour étudier le microplastique ? »
Les moules font partie des organismes les plus étudiés dans la problématique d’exposition des organismes marins aux microplastiques.
Le cas des moules est très intéressant, car la contamination des organismes filtreurs comme les moules pose le problème de la contamination de toute la chaîne alimentaire. D’autant plus que les micro-fragments de plastique se retrouvent ensuite dans le système circulatoire de ces dernières et vont donc s’accumuler dans les tissus avec des conséquences sur les prédateurs incluant les oiseaux, les crabes…et l’Homme ! Miam Miam !


Les missions scientifiques d’ATKA vont être menées jusqu’au 15 septembre au Groenland. Durant 2 mois et demi, le voilier ATKA est une base scientifique flottante. Le coordinateur scientifique Stephane AEBISCHER s’assure du bon déroulement des multiples missions scientifiques.
Pour en savoir plus, ne pas hésiter à contacter Anne-Claire (atka.anne.claire@gmail.com). Elle se fera un plaisir de vous répondre à vos questions.